AMOUR - HANEKE (2012) : l'amour et la mort, mais avant tout l'amour.

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AMOUR est un film sur l'amour. L'amour et la mort. À travers un couple de quinquagénaires nous voyons un tableau de l'humanité, le bon et le mauvais.
Georges et Anne s'aiment énormément, et cela est évident, malgré leur grand âge. Il font partie de ces couples qui font secrètement rêver tout le monde, cultivés, aimants, ayant réussi leur vie au point de pouvoir faire leurs grosses courses chez Monoprix, et s'étant épanouis au point de ne plus avoir besoin de rien que de la présence de leur conjoint. Cela commence bien, et pourtant, Anne tombe malade. Enfin, plutot, Anne commence à agir bizarrement. Ce qui commence avec de simple malaises va se révèler la plonger dans un paralysie du côté droit, de l'épaule à la jambe.


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Évidemment, c'est dramatique. Pourtant, jamais Haneke ne tombe dans le pathos et la facilité. Il reste dans la plus grande sobriété, celui qui montre avec un œil vif et acerbe une déchéance humaine plus que certaine. Anne va mourir à la fin du film, et nous le savons. Pourtant, on ne peut s'empêcher de se demander comment. Ce film joue sur notre curiosité viscérale et nous tient en haleine de par la pureté de ses images, et la crudité des plans.

Georges va t il tenir le calvaire de porter le poids de la déchéance de sa femme ?

Cela est la grande question, que nous pourrions reformuler ainsi :

Georges aime-t il suffisamment Anne pour la regarder mourir ?

Jean-Louis Trintignant et Emmanuelle Riva incarnent parfaitement deux personnages qui jusqu'au bout gardent une énorme dignité. L'un, en cherchant à chaque seconde à alléger le poids de la maladie pour sa compagne, l'autre, en essayant coute que coute de garder sa dignité, et de faire toute seule, tant qu'elle le peut encore.
Georges essaie d'alléger le poids de la situation. Il parle à Anne d'anecdotes, la divertit, lui fait penser à autre chose.
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Mais anne s'enferme. La maladie la rend asociable, elle une femme toujours souriante et généreuse, d'une grande intelligence. Finalement, elle est tellement enfermée dans sa maladie qu'elle ne veut voir qu'une personne : Georges. C'est le seul qui peut et pourra s'approcher. C'est le seul qui peut décider de son sort. Et lorsqu'elle lui fait comprendre qu'elle veut se laisser mourir de faim, il l'aide, même si cela lui fend le cœur, et le rend fou.

Finalement, c'est Georges qui va se laisser mourir, de désespoir. Et la police va découvrir les corps, celui de Georges dans la petite chambrette, et celui d'anne dans la chambre conjugale, sur son trente et un, et le corps entouré de pétales de roses.
Haneke n'est pas un cinéaste froid, ce n'est pas un cinéaste qui filme l'horreur. Il filme la vérité de la maladie, la réaction des acteurs étant très vraie, celle de la fille notamment, interprétée par Isabelle Hupert exprime une douleur accablante. Ils modélisent tout à fait la difficulté de ce que peut être l'accompagnement d'une personne dépendante pour tout, dans la vie de tous les jours.
     

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La mort est silencieuse, et la mort est pudique. Haneke a très bien su retranscrire cela. Ses plans sont essentiellement statiques, la caméra immobiles, les personnages s'agitant devant l'objectif. Les sons sont rares, les dialogues épurés, on ne dit ici que ce qui est nécessaire.
Au fur et à mesure du film, la lumière décroit. Georges et anne ne sortent plus. Georges ne va même plus faire les courses. Il reste avec Anne, ou reste dans le salon pour lui procurer le semblant d'intimité qu'elle a besoin. Lorsque cela devient difficile, il embauche des infirmières, et les congédient froidement quand elles se conduisent mal avec sa femme. De tout le film, il considère sa femme avec énormément de respect. Même sa fille ne peut pas en dire autant. L'élève d'Anne, est quand à lui très ému par l'état de sa professeure. Et pourtant, encore une fois, l'émotion est cachée. Il ne pleure pas, il garde ses pensées pour lui, il comprend vite qu'Anne ne supporte pas parler de sa condition. Il regarde donc, et joue le jeu.
Au fur et à mesure, georges se réfugie de plus en plus dans le salon. Nous comprenons que la tache de s'occuper d'Anne devient de plus en plus lourde. Les portes de la maison se ferment, la maison autrefois foyer accueillant devient un lieu où les pigeons rentrent par les fenêtres ouvertes, comme des corbeaux qui viendraient bouffer les corps encore chauds. Ca pue la mort, la décomposition et la maladie. Anne meurt, et Georges meurt aussi un peu.
Finalement, Georges se montre autant à la hauteur que ce qu'Anne peut l'espérer. Il l'étouffe avec un coussin, et nous assistons là à la scène la plus horrible de tout le film. Bien sur, anne ne crie pas. Son corps tressaute, et Georges desserre son étreinte. Elle est morte. Et pourtant, rien ne nous le dit.
La mort ne fait pas de bruit, et la mort est pudique. Amour quand a lui promet de faire du bruit longtemps.




Bande annonce d'amour : 





Drame autrichien de Michael haneke
acteurs : jean-louis trintignant, emmanuelle riva, isabelle hupert.
2h07 - couleurs
palme d'or du festival de Cannes 2012
European Film Award de la Meilleure actrice pour Emmanuelle Riva
European Film Award du Meilleur acteur pour Jean-Louis Trintignant
European Film Award du Meilleur réalisateur pour Michael Haneke
European Film Award du Meilleur film
- 6 nominations en France, non récompensé - une en Suisse, non récompensé. 


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